Un autre texte pas fini, j'suis en train de retravailler tout plein d'affaires et d'écrire des nouveaux textes donc j'met ceux-là pour divertir. J'pense qu'Oli tu devrais aimer celui-là.
Dylan s’est pas fait prendre pour un prisonnier fugitif quand il a chanté I shall be released. Pas plus que Hendrix était sur le LSD quand il a fait Purple Haze – ok mauvais exemple. C’est de la musique, ciboire. C’est pas une déclaration sous serment. Hank Williams a changé l’histoire de la musique country avec une guitare, un Stetson et des textes à faire pleurer un clown de rodéo. Mais ça restait toujours de la musique et seulement de la musique. Rien de plus. Pourquoi elle ne comprend pas, ça me dépasse.
J’ai écrit une chanson pour mon nouvel album. Je l’ai jouée à une émission de radio AM à Saint-Hyacinthe. L’animateur est mon batteur. Et la station appartient à son père. Je les connais depuis trois ans, ils sont en partie responsables pour mon succès dans les Cantons-de-l’Est. Quand l’animateur m’a demandé de jouer à son émission, j’hésitais entre trois pièces : Fleur de choux, Moto et Claudia.
Fleur de choux parle d’une histoire d’amour entre un jeune de vingt-cinq ans et une femme de soixante-seize ans. C’est un Harold and Maude country. Ça m’est venu en juillet, dans ma Tercel, quand je suis sorti de la 112 pour traverser Rougemont par les petites routes. J’allais en ville pour négocier mon nouveau contrat de disque. En passant devant une résidence pour personnes âgées, j’ai croisé le regard d’une femme. Elle était assise sur un balcon. Ses cheveux blancs brillaient au soleil et j’avais de la misère à discerner si elle souriait ou si elle plissait les yeux. J’ai souri. Quinze minutes après, j’avais une chanson.
Moto vient d’une émission de télé dans laquelle une moto parle et interagit avec les personnages de l’émission. C’est la suite de K-2000, avec le neveu de David Hasselhoff, Jan. Dans ma chanson, Moto prend un flat en faisant un wheelie et s’écrase, en explosant, sur le mur d’une école primaire. Ça devait symboliser la destruction de l’éducation au profit des nouvelles technologies, mais tous les gens à qui je l’ai jouée m’ont dit que c’était impossible parce que Moto a un système de détection des objets pouvant crever ses pneus et un ensemble de lasers prêts à les pulvériser. Mon batteur m’a même expliqué que Moto ne peut pas exploser, qu’elle carbure au nitrate de sodium de bicarbonate de soude – quelque chose comme ça – et qu’elle dégage une odeur de réfrigérateur.
Au moment de décider quelle chanson j’allais jouer, la veille de l’émission, Fleur de choux et Moto ne sonnaient pas exactement comme ce que je voulais qu’on retienne de l’album. Prises à part, elles étaient trop différentes du point de vue thématique. Dans le cadre de l’album, ça se tient parce que les deux tounes sont respectivement au début et à la fin. Et toutes les autres n’étaient pas encore à point. Il me restait Claudia, qui est une petite valse country sur fond de ukulele. Le texte pour celle-là parle d’une amie que j’ai eue qui s’appelait vraiment Claudia et qui a quitté son mari le lendemain de ses noces. Je chante à partir du point de vue du mari. C’est ma préférée de l’album, elle est simple, mais elle frappe les bonnes cordes. C’est le centre de l’album.
Mais mon ami m’avait demandé de jouer deux chansons. J’en avais une. Sur le tas, j’ai composé un blues, un peu folk, qui s’intitulait Hank. C’est à propos d’un trucker qui s’appelle Hank et qui me ramasse alors que je fais du pouce. Il me raconte sa vie et me décrit des paysages qu’il a vus (« As-tu déjà vu les plaines de l’Arkansas sous le soleil d’hiver»). On fait un bout de chemin ensemble et il me débarque en face de la station de Métro. La chanson est bonne, le blues est bien ressenti et juste. Et il y a une petite touche de fraternité, de solidarité d’un voyageur à un autre, qui rappelle On the Road de Kerouac.
Mais c’est justement cette touche de fraternité, quand j’y repense, qui a cloué mon cercueil. J’ai joué Claudia et Hank à l’émission de radio. J’étais content, ça s’était bien passé. Une petite fausse note, mais le régisseur et mon ami m’ont dit que ça n’avait pas paru. Quand je suis rentré chez moi, à dix heures du soir, ma blonde Camille était couchée. Je me suis déshabillé dans le noir, en silence et je me suis glissé derrière elle sous les couvertes. Je voulais me coller, mettre ma main entre ses seins pour la sentir respirer, mais elle m’a repoussé en renvoyant mon bras sèchement vers moi. Elle est souvent somnambule. Je me suis retourné, j’ai rien dit et je me suis endormi.
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2 commentaires:
C'est un beau texte. Il resterait à développer la fin du premier paragraphe et L'histoire de la blonde là-dedans. J'aime ça comment tu parles des tounes. C'est comme évident à lire les descriptions que ces évènements-là peuvent donner une chanson. That's hot
Salut Will,
C'est vraiment bon!
Quand je lis tes textes, une succession d'images se déroule dans ma tête . C'est comme être dans la Lune. À la fin, j'me réveille un peu en sursaut.
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