17.6.07

je m'éparpille (ou je déménage)

Dorénavant, je publierai mes trucs ici: http://twistnserve.blogspot.com/
Le changement me fait du bien. Même si ce blog m'a toffé un bon deux ans et demi - et je ne l'abandonne pas vraiment, hey, on tape «la belle jambe» sur google et je suis les trois premiers résultats, I'm big, man, real big - j'ai envie d'être ailleurs un peu. Ça doit venir avec le déménagement, la maîtrise, etc. Et c'est un projet avec Anne, en attendant d'en avoir des plus sérieux...

modern wars

Nouvelle chanson sur myspace

hard fought war - with myself - modern wars - i feel like hell - kept me up - it's hard to tell - what she said - is hard to tell - stay in place - change your mind - you earn your pay - you fall asleep - you laugh somedays - you lose the beat - lose the streak - break your chair - and move away

when you'll find yourself - let me know - modern wars - are never long - try for luck - or an easy pay - work your way - to a failed career - i need some space - to untie my face - i'll work my way - to an empty nest - to a fucking mess - I won't say it yet - but some insects can stop their heartbeat on command

(quand tu parles tu parles en fractions - les chiffres te sortent par la tête - peur de perdre toute son affection - tu t'enfermes dans une tempête)

30.5.07

JOB D'ÉTÉ




Cet été, je célèbre un retour aux sources. Je m'étais éloigné des jobs de service à la clientèle les trois derniers étés. J'ai été tenté par l'idée d'un no-brainer manuel, physique et dehors: assistant-horticulteur pour la Ville de Bromont deux étés, et installateur et réparateur de systèmes d'irrigation avant ça à Montréal. Ma toute première entrée dans l'univers des jobs d'été, je l'ai eue à Granby. À la sécurité au Zoo de Granby. Trois étés super cool, où j'ai fait plein d'amis. L'exemple parfait de première job d'été, style camp de vacances, où tout le monde est jeune et sympathique, et le travail est ben l'fun.



Là je me retrouve, 23 ans, bachelier en littérature, à faire ce qui risque d'être -- si tout va bien -- ma dernière job d'été. Et, en grosse partie, elle consiste en une version beaucoup plus payante de mon poste de préposé à la sécurité quand j'avais 15 ans, au Zoo de Granby.

28.5.07

ELLIOTT SMITH IS ELLIOTT SMITH IS ELLIOTT SMITH




Acheté New Moon, la dernière compilation d'inédites d'Elliott Smith enregistrées entre 1995 et 1997. Il s'agit d'un album double de pièces qui n'avaient pas trouvé leur place sur l'album éponyme, sur Either/Or ou sur XO. Ma première crainte était de découvrir qu'on étirait la sauce ici. Et, à date, j'sais pas. Parce qu'il y a ici des trouvailles écoeurantes, des chansons qui se seraient démarquées sur n'importe quel album officiellement paru. Je pense surtout à «Half Right», «Go By», son cover de «Thirteen», «Whatever (Folk Song in C)». Des chansons qui, comme à chaque album d'Elliott Smith, systématiquement pour moi, deviennent des gateway songs; des chansons-poupées russes, mettons. Quand j'ai acheté XO, c'est la guitare de «Independence Day» qui m'a ouvert sur «Tomorrow Tomorrow» qui m'a ensuite fait mieux apprécier «Sweet Adeline» qui m'a fait comprendre les paroles de «Waltz # 2 (XO)» qui ont vraiment allourdi «Everybody Cares Everybody Understands» et ainsi de suite. C'est la même chose à chaque album: mon appréciation part d'une seule chanson qui porte toutes les autres par n'importe quel processus d'association. C'est ce qui fait de la musique d'Elliott Smith une chose si complète.

Mais là, un album double de chansons qui n'ont pas été choisies par l'auteur, c'est difficile de croire que l'effet sera le même. Je me suis retenu de l'acheter au début, justement à cause de cette crainte de faire outrage, dans ma tête ou dans mon coeur, à l'oeuvre de Smith. Comme les gens qui refusent de voir les scènes supprimées de films qu'ils ont aimé. Comme si ça allait rendre tout le reste très artificiel. Mais, si j'ai ce cd dans mon lecteur en ce moment, c'est que j'ai compris que mon rapport à l'art est celui d'un voyeur. Je veux tous les détails. Je veux le making of; la biographie; les scènes supprimées; les bloopers; la chorégraphie stupide mettant en vedette les caméramen, les soundmen, les maquilleuses, les fucking traiteurs, sur une toune de Sinatra. Donc, comme un ex-fumeur s'en grille une en cachette dans la salle de bain debout sur une chaise en-dessous du ventilateur, j'ai acheté New Moon.

Et, pour être franc, à mon grand étonnement, l'album marche. C'est peut-être un talent de compilateur -- Christopher O'Reilly, pianiste classique qui reprend des pièces de Radiohead et d'Elliott Smith au piano solo, en écrit toute une éloge dans le livret. C'est évident, les gens qui ont monté cet album connaissent Elliott Smith beaucoup plus que moi. Tranquillement pas vite, à force d'écouter, se crée en moi le même effet poupée russe.

Sans rien enlever à ceux qui ont choisi les pièces, je crois que ça les dépasse, eux aussi. C'est lui, c'est Elliott Smith, ce big nothing regretté, qui rend tout équilibré. Il a la même intensité qui tache toutes ses chansons d'une aura grise. Et c'est même pas triste. C'est touchant, c'est un jeu de guitare hallucinant. Mais, surtout, aime ou aime pas, c'est du Elliott Smith.

16.5.07

La mort de Pandora

Hier, j'ai appris par courriel que Pandora n'autoriserait plus l'accès aux utilisateurs canadiens. J'avais réussi à contourner leur système en me forgeant une adresse burlingtonienne -- ou Plattsbourgeoise? --, au Vermont; mais là, ils peuvent détecter l'origine des utilisateurs à travers le signal du modem -- ou un truc d'internet que je ne connais pas, ajoutant certainement à ma déception. Donc, ils lisent sûrement pas ça, mais d'ici je les remercie pour m'avoir fait découvrir : Devendra Banhart, Sufjan Stevens, The Microphones, Badly Drawn Boy, The Mountain Goats, M. Ward, Lou Barlow, Someone Still Loves You Boris Yeltsin, Junior Kimbrough, Sean Hayes, The Elected, Alan Singley And Pants Machine, Welcome Wagon, Joel Plaskett, The Minders, Ferraby Lionheart, Prince Edward Island, Freddie Redd Quartet, The Kooks, Lullaby Baxter, Mason Jennings, Patrick Park, Tegan And Sara, The Skygreen Leopards, et plusieurs autres artistes qui ressemblaient de près ou de loin à ce que j'avais envie d'écouter là-dessus. Merde, j'suis vraiment déçu. Et à lire les commentaires sur le blog de Pandora, je ne suis vraiment pas le seul. Je viens de perdre une de mes sources principales de nouvelle musique.

9.5.07

GROSSE BOUFFE



Papa: «Comme ça la femme a son spégate, les jumelles Danyka pis Vanessa ont leu' pidze, le beau-fré a sa poutine, la voisine a ses frites, Danyk a son gâteau au tchoclute, la belle-mé a son poulet, pis moé, ben, j'ai mes ailes.»

Maman: «Ouin, meilleur spégate en ville. Pis du Petsi pour tout le monde. Pas cher en plus. Pis tu peux choisir ta sorte de pizza. Pis t'as de la coleslaw avec le poulet. Pis la sauce brune, pour faire descendre ça.»

AAAAH!!!


27.4.07

(début de quelque chose de plus gros)


- Ça veut dire quoi Tearjerkers?
- C’est ce qui fait pleurer. Des chansons qui font pleurer.
- Sur vingt titres, y’en a juste trois qui n’ont pas le mot love dedans.
- Le soul avant Marvin Gaye, c’est juste de l’amour. Lui qui veut elle, lui qui laisse l’autre, l’autre qui pleure…
- C’est drôle.
- Elle qui laisse lui, lui qui revient avec l’autre, elle qui pleure. C’est à croire que les années soixante aux États-Unis sont une énorme peine d’amour.

Imagine ça une minute, une énorme peine d’amour. Tout Detroit, tout Chicago, tout Dallas en perpétuel heartbreak. Ça ne se limite pas au soul; le rock’n’roll, le jazz, le blues, le country – merde! le blues, le country! Une nation au complet qui vient de se faire crisser là. Des centaines d’hommes qui rentrent travailler les épaules basses, les mines atterrées, les mains molles. Leurs boîtes à lunch en alliage qui traînent par terre. Leurs vestons qui, à la taille, flottent au vent comme des drapeaux en berne. Des centaines de milliers d’os qui frappent le sol américain dans une batterie monotone, une chain-gang de dépressifs. Les femmes mangent leurs émotions. Les hommes boivent.

Imagine toute la première moitié du vingtième siècle américain comme une immense peine d’amour. La vraie Grande dépression. Personne n’aurait même songé à la prohibition. Les églises toujours remplies, mais plus silencieuses que jamais. Le gospel n’existe pas – parce que les chanteurs ont tellement de peine qu’ils perdent toujours le rythme. Ça devient des canons dissonants, une cacophonie d’évangiles. Les enfants jouent au baseball en silence. Ils mâchent leur gomme lentement, sans jamais laisser sortir une balloune. Ils frappent la balle mollement; et si l’un d’entre eux l’envoie de l’autre côté de la clôture, ce n’est pas plus excitant. On fait le tour des buts, on marque un point, on change le score au tableau, et c’est play ball à nouveau.

Dans les speakeasies, les juke joints, les pool rooms, les hommes boivent pinte après pinte des pires ales, sans jamais parler. Le blues est fort, omniprésent; il entre par les oreilles et sillonne les veines. Au Mississippi, si on devait prendre un échantillon de sang des habitants, noirs ou blancs; il serait constitué de trente-trois pour cent d’hémoglobine, trente-trois pour cent d’alcool, et trente-trois pour cent de Robert Johnson, Muddy Waters et Lightnin’ Hopkins. Des centaines de milliers de petits bluesmen qui frappent les parois de chaque capillaire, se réunissent dans les artères, et chantent jusqu’au cœur. Partout dans le Sud-Est des États-Unis, les gens sont traversés par des gémissements de bluesmen qui dictent leur rythme cardiaque. Le pouls de tout Memphis en rythme ternaire syncopé.

Dans les cafétérias partout dans le pays, les gens mangent en sapant, puis se tapent dessus pour avoir mangé en sapant, puis se rassoient et continuent à manger en sapant. À New York, dans Central Park, sur tous les bancs, à tout moment de la journée ou de la nuit, des gens poussent des soupirs en fixant le vide devant eux. Les chauffeurs d’autobus de Manhattan oublient la moitié des arrêts. Les gens se crient après dans les galeries de Greenwich Village, mais finissent toujours par se taire et pleurer devant un Stuart Davis, ou un De Kooning, ou même un Mel Ramos, tant qu’à y être. À Harlem, ça s’immole au quotidien. À Hollywood, quand on ne filme pas des ordures, on plante les caméras sur le boardwalk de Venice Beach et on zoome sur le Pacifique. Tous le cinéma hollywoodien est obsédé par cette ligne d’horizon traversant l’écran en plein centre. Et, une fois de temps en temps, le flanc d’un passant qui obstrue momentanément le regard de la caméra vers l’Ouest impalpable.

Franklin D. Roosevelt et Eisenhower finissent tous les deux par se pendre à un chandelier de l’Oval Office – chacun le sien. Kennedy meurt d’une overdose d’héroïne dans une ruelle de West Philadelphia.

Toute l’americana est peuplée de commis de banque accoudés de tout leur long sur les comptoirs des diners. À côté d’eux, des policiers qui boivent leur café noir sans sucre en silence, devant une pointe de tarte aux pommes grise et morne, et une boule de crème glacée à la vanille toute dure, sans vie, plastique. Imagine tout en noir et blanc. Ou pire, tout en gris. Les barbiers font tourner leur cylindre en noir, blanc et gris. Ça tourne, monotone, et on n’entend que le mécanisme de la patente jusqu’à ce que la porte du salon s’ouvre et fasse sonner la clochette; puis, c’est le mécanisme qui reprend. Des «G’morning, Bob.», des «Howdy, Jimmy.» déphasés, nonchalants.
Et Norman Rockwell est exilé à Cuba, où il peint des enfants fumant des cigares devant une affiche montrant Fidel et Che en habits carreautés rouge, jaune, bleu, multicolores, sur un terrain de golf. Derrière eux, il y a deux femmes qui ressemblent beaucoup à Jane Russel et Marilyn Monroe.

- T’es où là?
- Dans ma tête.
- Viens avec moi, j’ai besoin d'aide pour placer les livres.

14.4.07

Mon nouveau site préféré

http://entenduamontreal.wordpress.com

Au rayon des surgelés, un couple négocie l’achat d’une pizza :

♂ : Ah non ! Pas au poulet.
♀ : Comment ça “pas au poulet” ???
♂ : C’est pas bon.
♀ (s’énervant) : Crisse, je peux jamais rien choisir !
♂ : Ben voyons. C’est quoi c’t'histoire-là ?
♀ (dans une crise de rage intense) : Ça fait 2 ans que je mange de
l’esti de cheddar doux, criss!

♂ : Ben là… Tu peux en prendre du blanc si tu veux.

Entendu par AC au supermarché Maxi, coin Masson et
Iberville.


sur le site, on trouve un lien pour la même affaire à New York:

http://www.overheardinnewyork.com/

Family man: We watched two guys fight to the death
over a parking space, and then we went to the Ice Capades.--Central Park, W 72nd (Overheard by: Rachel)

...


Girl #1: Nice scarf. Did you knit it
yourself?

Girl #2: Fuck you. Don't talk to me.
--F train

9.4.07

COURS DE SANTÉ ET SÉCURITÉ SUR LES CHANTIERS DE CONSTRUCTION



Quelque chose s’est passé pendant la pause cigarette. Steeve avait un gros sourire en plastique et la réplique en cinquième vitesse avant la pause. Le prof l’avait remarqué, il l’avait pointé du doigt, lâché quelques cracks, l’avait traité de smatt. Ça avait fait rire les autres, et Steeve aussi. Il lui avait répondu quelque chose comme «Oué, vieux crisse.» Et tout le monde, y compris le vieux crisse en question, avait bien ri. Un autre exemple comme quoi la camaraderie entre hommes passe inévitablement par l’insulte.

J’ai commencé à écrire ce texte dans ma tête après la première pause cigarette du cours de santé et sécurité sur les chantiers de construction que j’ai suivi durant les deux dernières fins de semaines. Je me souviens d’avoir réellement pensé la première phrase, parce que je me souviens d’un gars qui s’était identifié dès les premières minutes du cours comme étant à la fois la grande gueule, le tough et le délinquant du groupe. Mais, quand il est revenu de sa cigarette, et à partir de là, il n’a plus dit un mot.

Bon faut expliquer, faut mettre en contexte. Qu’est-ce que l’étudiant en littérature peut ben crisser là? Réponse : pour avoir mes cartes pour travailler comme manœuvre. Un ami du secondaire m’a dit qu’il pourrait me mettre en contact avec tel ou tel syndicat, et eux me trouveraient une job sur la construction, et moi je ferais beaucoup d’argent cet été. Le cours coûtait cent piasses, durait deux fins de semaine, de huit à quatre, à deux minutes du métro Saint-Michel, dans un ancien salon de coiffure – avec les miroirs, les éviers spéciaux et tout.

En fait, je viens d’allumer, ça se passait vraiment dans un
ancien salon de coiffure! Une trentaine de mâles poilus, exhalant de toutes parts, vêtus de Point Zero, de polars Private Member et de bottes à caps d’acier, au milieu de murs fuschia et de miroirs rectangulaires; les lumières fancy qui frappent leurs casquettes des Canadiens en filet de plastique et en mousse. Merde, j’aurais vraiment dû allumer là-dessus avant!

Anyway, salon de coiffure servant maintenant au cours adressés aux travailleurs de la construction. Les deux fins de semaines les plus pénibles de toute mon existence. Et c’est pas peu dire, j’ai passé des fins de semaines à l’hôpital, dans des cours de sauvetage, debout devant une clôture à sourire aux clients du Zoo de Granby; j’ai de l’expérience solide en emmerdement, dommage qu’on puisse pas mettre ça dans un c.v.

Le prof avait la physionomie d’un pitbull : l’énorme mâchoire mise en évidence par une moustache descendant jusqu’au bord du menton, les jambes courtes et en «O», la bédaine comme un gros roc rond, les oreilles qui pendent. Et il a commencé le cours en disant que la semaine d’avant une femme qui avait participé à son cours avait porté plainte à son égard – il n’y avait pas de femme dans notre cours. Il disait, «Tsé, c’parce que moi j’adapte mon cours en fonction des gars de la construction. Pis la plotte, ben qu’est-ce tu veux j’te dise, en autant qu’j’suis concerné – traduction libre de «as far as I’m concerned», originale celle-là, tu peux pas les inventer les phrases comme celle-là, il faut les avoir entendues – à devrait s’attendre à n’entendre des affaires de-mègne.»

Et immédiatement, à force d’entendre ce gros pitbull japper des atrocités à propos des femmes, des communauté ethniques – «Des crisses de nouaires, j’ai rien contre ça, on devrait toutes n’avoir deux… des esclaves, ostie.» et «Haw! Haw! Haw!» de s’esclaffer le groupe, parce qu’on est tous blancs dans le salon de coiffure –, des homosexuels; m’est venue l’idée de ce texte. Un texte à propos d’un de ces membres de la société, sûrement l’homosexuel maintenant que j’y pense, qui subit cette dynamique de cours.

Je l’ai pas encore écrit, parce que la réflexion n’est pas encore tout à fait à point.

Entendre ce discours misogyne, raciste, homophobe, syndicalo-paranoïaque, et – dangereusement – nationaliste, et entendre comment ce gros moron l’associe si facilement avec le langage du travailleur de la construction; ça m’a fait me demander si on n’alimentait pas un peu le stéréotype de ce fameux gars de la construction. Si le gros fasciste du FTQ se place devant une trentaine de nouvelles recrues qui, on s’entend, possèdent déjà une certaine partie du stéréotype, à chaque deux semaines, en leur disant que lui, il ajuste son cours pour «parler comme eux.» Et que parler comme eux signifie traiter les femmes de plottes, les noirs d’esclaves et de criminels, les homosexuels d’ostie d’fifs. Je me demande vraiment qui est-ce qui s’adapte réellement.



Tout à coup, je me trouve bien loin du Renaud-Bray dans le village, moi là.

J’suis pas le plus grand amateur du politiquement correct, mais il y a quand même des limites. Il y a une différence entre un commentaire subjectif et de la fucking démagogie eftéquiste – mot inventé, 10 pts vocabulaire-plus. Les médias et les politiciens parlent de souveraineté, d’autonomisme, et en même temps, t’entends parler d’homophobie en région, de racisme. Là, pour la première fois réellement, j’ai pu assister à l’extrémisme québécois. C’est facile, du haut de ma niche universitaire-petite-bourgeoisie-pseudo-montréalaise-dans-la-vingtaine, de s’indigner pour n’importe quoi. Mais, j’en ai vus de toutes sortes avec mes différentes jobs, mes connaissances, certains membres de ma famille; et jamais je n’avais été témoin d’une intolérance aussi affirmée.

Et le pire, c’est qu’il a toute une autorité le gros pitbull. Il a une cinquantaine d’années de métier dans le corps et il a de la gueule. En sortant du salon de coiffure ce midi, à la fin du cours, les gens n’avaient que des éloges et des remerciements pour lui. Un ostie de bon gars. Qui s’gêne pas à part ça.

En tout cas, le texte risque d’être pas mal plus drôle que ça, ici. J’avais le goût de faire un peu d’éditorial ce soir. Maintenant, je peux en rire.

7.4.07

dead dad (titre provisoire)

i am losing my shoe
the laces feel like the hangman's rope
my sole is burnt and my tongue is torn
this is my decline
i rose i rose but this is fine

i am losing my bout
ran out of rounds, fell to the mat
feels like coals burning in my back
this is my decline
i rose i rose still this is fine

this is fine

***

draw me a picture of the dog
make it look like it's hot
and i'll hang it on my wall
ah ah

make a painting with your feet
then go running on the lawn
maybe we can throw a ball
ah ah

find a girl who'll hold you tight
dream of a life and smile wide
someday it will make you fall
ah ah

keep on jumping 'till you're tired
you'll lose your breath and you'll get cramps
you'll find i'm not that tall
ah ah

and when i die please don't look back
on the things you think you forgot
i think you're not that small
ah ah

30.3.07

DIALOGUE (nouvelle chanson sur myspace)

BOY : You grew up wearing masks
GIRL : My skin kept growing through
B : Woods were full of bees
G : It wasn’t my fault
B : I held on to your hand
G : And I took it back
B : You called me a coward
G : Then I took it back
B : Weeds were up to my eyes
G : I cut myself a path
B : Your lips felt like clouds
G : Why didn’t you kiss me back?

B : Hide your face in your hands
And make the feeling pass
It’s over now
Think of pretty things like fireflies
Boy, girls cry all the time
It’s over now

B : Followed you every night
G : That summer was nice
B : Fire ate the barn
G : Lightning made it fry
B : Please don’t tell your mom
G : I never wore a mask
B : Your legs felt so warm
G : You chased me with a stick
B : Corncobs and lemonade
G : I hated you for weeks
B : I loved you even then
G : Why didn’t you kiss me back?

23.3.07

FAIS-MOI UN BÉBÉ, MON HOMME

- Viens-tu juste de m’appeler «mon homme»?
- Oui.
- C’est un peu bizarre.
- J’sais pas.
- Pas sûr d’aimer ça.
- Non?
- Hmm.
- Pourquoi tu t’arrêtes?

«Mon homme», c’est ma mère qui me dit ça, depuis que j’ai sept ans. Depuis que mon père est parti de la maison, vivre avec son ex-belle-sœur, ma tante Francine, la sœur de ma mère, au Connecticut. C’est moi l’homme de la maison depuis ce temps-là. L’homme de maman en tout cas. Et là, d’entendre Stéphanie me chuchoter ça à l’oreille, tandis que je m’apprête à m’insérer en elle, c’est un peu étrange. Je vois Freud debout à côté du lit me dire «ben kin!» en levant les épaules et les sourcils.

- J’sais pas. J’ai un peu mal au ventre, honnêtement.
- Pour vrai? C’est tu parce que je t’ai appelé «mon homme»?
- Non non, j’te jure, j’ai mal au ventre. J’ai trop mangé. On recommencera plus tard, peut-être. Là, j’sais pas.
- Ah, j’avais vraiment envie de toi…

Faire un enfant. Oui. Faire un bébé, fonder une famille. Oui. Je suis prêt. Vingt-huit ans, Stéphanie en a vingt-six. On est prêts. Oui. On est tous les deux au travail. On habite ensemble depuis quatre ans. On s’entend bien, la plupart du temps. On fait des soirées avec des couples d’amis, on sort chacun de son côté. On a des vies pleines, des vies ancrées, stables. Les cinq à sept, les showers de bébé, les réer, les comptes conjoints, les fonds de pension, les visites de bungalows sur la Rive-Sud, les électroménagers, les diètes de couples, les semaines insupportables, la vie tranquille, no alarms and no surprises. Faire un bébé. C’est le temps.

- Oui, moi aussi. Vraiment.
- Est-ce qu’y’a quelque chose que je peux faire?
- Non.
- T’es sûr?
- Oui.

Dormir, arrêter de parler, t’éloigner un peu, changer de pièce, faire du thé, te rhabiller, te laver, enlever ta main de sur mon pénis, arrêter de me caresser, détourner ton regard qui essaie d’être sexy – tu ne peux pas essayer d’être sexy, tu l’es ou tu ne l’es pas, si tu essaies, c’est que tu ne l’es pas –, me proposer un threesome avec ton amie Valérie, me demander de mettre un condom, recommencer à prendre la pilule, arrêter d’être suppliante, de dépendre de mon plaisir, te frustrer, me confronter, me faire une crise de bébé, me frotter ma passivité dans la face, voir ailleurs, me tromper, tomber enceinte d’un autre homme, me donner une bonne raison pour te laisser, une raison plus forte que juste «là j’m’emmerde, c’est plate», me quitter.

- Moi j’pense qu’y a quelque chose que je peux faire…
- Pas tout de suite, Sté, j’file pas tellement.
- Après ça, tu vas aller pas mal mieux.
- J’pense pas…
- Tiens, jette ma gomme, pis relaxe un peu. J’m’occupe du reste.
- J’pense pas, Sté…

Il y a un mois, on a décidé qu’il était temps de penser à ça. Faire un bébé. Je lui ai proposé de m’épouser à la place – plus symbolique, moins important. Mais elle veut un bébé. Une petite fille qui va s’appeler Laurie, qui ne portera que des robes, et des lulus, et des bouquets de marguerites. C’est tout planifié. Elle a arrêté de prendre la pilule, et elle regarde les mobiliers pour enfants dans le catalogue Ikéa qui traîne derrière la toilette – je le sais parce qu’elle encercle ceux qu’elle aime au crayon feutre. Et moi je me dis que je suis dans la merde. Ça fait un mois qu’on a décidé d’avoir un enfant, et ça fait un mois qu’on n’a pas fait l’amour.

En fait, ça fait beaucoup plus qu’un mois qu’on n’a pas fait l’amour. Honnêtement, on n’a jamais réellement fait l’amour. Du sexe, peut-être. Mais pas tellement non plus. Du sexe, c’est cochon, c’est suant, c’est de l’exercice, c’est dirty. Avec Stéphanie, c’est comme un shift dans l’usine d’élastiques où j’ai travaillé à seize ans. Monotone, routinier, cyclique, rapide et abrutissant. On mise sur l’efficacité.

La différence, c’est qu’à la shop, il y avait Isabelle, la fille du patron, qui me kidnappait une fois de temps en temps pour faire des cochonneries dans le fond de l’entrepôt. À tous les jours de cet été, chaque garçon embauché à l’usine rêvait qu’aujourd’hui, Isabelle s’arrête devant sa station, et qu’elle l’enlève pour une petite demi-heure. Ses gros seins moelleux, ses cheveux bruns, ses yeux noisettes, ses lèvres. Isabelle Perron. Isabelle Perron. Isabelle, ah oui Isabelle…

- Wow! Déjà?
- …
- T’as pu mal au ventre là?
- Ça va un peu mieux, oui.

Elle se lève, elle s’habille et elle part à la toilette. Qu’est-ce que je fais? Je ne veux pas d’enfant. Pas maintenant. Pas avec elle. Je veux Isabelle Perron. Je veux une maman cochonne. Je ne veux pas une maman qui m’appelle «mon homme», comme ma maman à moi. Je veux pas avoir un enfant avec ma maman! Merde! Comment j’ai pu dormir pendant quatre ans? Est-ce que je suis typique à ce point? Ces histoires d’hommes dans la trentaine qui refusent l’engagement, le fuient comme la peste. C’est moi? Et pourquoi Freud est encore là, à me regarder avec les sourcils levés? Allez donc chier, Sigmund Freud! Je vous ai rien demandé. C’est rien de psychologique, c’est un hasard. Je couche pas avec ma mère. Je couche avec sa réplique. Mais c’est pas moi. C’est elle. Et puis je ne suis pas le seul. Allez donc chier.

J’étire le cou vers le corridor, et j’entend Stéphanie reniffler dans la salle de bain, comme si elle était en train de pleurer. Elle pleure? Qu’est-ce que j’ai fait? J’ai dit «Isabelle Perron» en jouissant tantôt? Elle réalise que je n’en veux pas d’enfant? Pourquoi elle pleure? Qu’est-ce que j’ai fait?

- Ça va?
- Oui oui.
- Tu pleurais?
- Oui.
- J’ai envie de toi.
- …
- Maintenant.
- …
- J’vais te faire un bébé.
- …
- J’vais te faire un bébé, maintenant. Tu vas être une maman.

18.3.07

EXTREMELY LOUD, INCREDIBLY CLOSE & ABSOLUTELY BRILLIANT

Je n'y croyais pas vraiment. J'avais entendu dire que ça arrivait des fois, à certaines personnes, au bout de chapitres très intenses. Qu'une écriture puisse marquer à ce point l'attachement du lecteur. Et puis, j'en ai lu quand même pas mal, de ces livres mobilisateurs -- ces livres qui te figent, que tu ne peux plus poser, qui te collent aux doigts. Mais ça restait de l'ordre du mythe, de la légende urbaine : le livre qui fait pleurer.

Je ne suis pas un bloc de granit, mais comme une bonne majorité des gars que je connais, il m'arrive très rarement de m'émouvoir au cinéma. À part pour la mort de Cléo dans La guerre des tuques -- et encore là, ça relève plus du retour à l'enfance --, j'ai la glande lacrymale assez difficile. Ça c'est au cinéma; la littérature a toujours fait travailler d'autres muscles, ou n'a jamais pincé cette corde-là en tout cas. Et je dois spécifier que je suis grippé ces temps-ci, donc ça doit affecter ma fatigue et mon humeur. Et puis, tant qu'à y être, j'avais sûrement juste quelque chose de pogné dans l'oeil.

Bon, ok. Assume. J'ai braillé en lisant un livre. Mais pas n'importe lequel. Un cadeau d'Anne, qui avait aussi envie que moi de le lire, dont le titre est Extremely Loud & Incredibly Close de Jonathan Safran Foer.

J'essaie de m'expliquer les yeux mouillés du fait que c'est un cadeau de mon amoureuse, j'y ai peut-être mis une attention plus particulière, plus émotive. Mais non, elle aurait pu me donner Gunni le guerrier et je n'aurais pas été vraiment plus attentif. Avec Extremely Loud & Incredibly Close, elle prenait une chance, et ç'a marché.

L'auteur est new-yorkais, il a écrit Everything Is Illuminated, qu'on a adapté en un film que je n'ai pas encore vu -- mais je crois que je vais attendre de lire le livre, maintenant que je connais mieux l'auteur.

J'ai beaucoup de misère à en décrire l'histoire parce que j'ai peur que ça sonne trop banal. C'est un livre qui m'a beaucoup fait rire, super sensible, touchant. Avec un narrateur de neuf ans ultra-geeky qui fait penser à un mélange de Napoleon Dynamite et The Catcher In The Rye.

Donc je n'essayerai pas de donner le résumé ici, vous lirez la quatrième de couverture. C'est une histoire avec plein de correspondances, plein d'humour -- pour tous ceux qui aiment l'humour nerd. Un roman qui traite des attaques sur le World Trade Center sans exclure tout le reste de l'Histoire de l'humanité. Investi d'un imaginaire extraordinairement riche. Et tout un appareil paratextuel -- oh littérairrrhheuh -- d'images, de couleurs, d'impression tronquée, de flipcards, dont l'écriture aurait pu aussi bien se passer. En tout cas, si ça peut vouloir dire quelque chose, ce livre s'inscrit dans ma bibliothèque comme étant le premier à m'avoir fait pleurer.

Même si pour vrai j'étais pas mal fatigué, sous médication, pis messemble que j'avais quelque chose de pogné dans l'oeil, à un moment donné.